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Immobilier : la crise vers la fin ?

En France, un nombre croissant de personnes éprouve des difficultés à acquérir leur résidence principale ou tout simplement à se loger. La proportion de propriétaires au sein de la population stagne à 58 % depuis une dizaine d’années. Selon la Fondation Abbé Pierre, 3,8 millions de Français seraient mal logés. Ces derniers temps, la hausse des taux d’intérêt a été incriminée pour expliquer les difficultés à acheter un bien immobilier. La baisse des transactions semble donner raison à cette thèse. Or, le problème est plus profond et complexe qu’il n’y paraît.

La hausse des taux d’intérêt et la diminution des ventes ne se sont pas traduites par des baisses sensibles au niveau des prix. Le marché de l’immobilier est un marché fermé avec peu de biens en vente et de primo-accédants. Les propriétaires refusent d’ajuster à la baisse le prix de leur logement en jouant la montre. Les jeunes ménages, de leur côté, n’ont pas des apports suffisants pour acheter à proximité de leur lieu de travail un logement convenable. Les taux d’intérêt, non pas ceux d’aujourd’hui mais ceux d’hier, sont en grande partie responsables de la crise du logement. Nul ne doit, en effet, oublier que si les faibles taux d’intérêt entre 2015 et 2022 ont fait le bonheur de quelques-uns, ils ont surtout conduit à une hausse sans précédent des prix de l’immobilier, +30 % en moins de dix ans. Ils ont également favorisé une concentration du parc de logements locatifs dans les mains d’investisseurs jouant sur l’effet de levier.

 

Le marché de l’immobilier a été, en outre, déstabilisé par l’essor des locations saisonnières ou de tourisme qui concernent, en France, 1,2 million de logements sur un parc total de 37 millions. Dans les grandes agglomérations et les villes touristiques, les propriétaires recourent de plus en plus aux plateformes Internet pour louer leurs biens à des prix élevés, créant un effet d’éviction au détriment des résidents, en particulier des plus jeunes d’entre eux. La diminution du parc locatif traditionnel contraint de nombreux ménages à accepter des logements situés en lointaine périphérie des centres-villes. Le poids des dépenses de logement au sein du budget des ménages a fortement augmenté ces trente dernières années, poids pouvant atteindre plus de 30 % pour les ménages les plus modestes ne pouvant pas accéder au parc social. La crise du logement en France trouve sa source dans le déficit chronique de constructions de logements neufs. En juin 2024, le nombre de logements commencés sur un an ne dépassait pas 275 000 alors que les besoins sont estimés à 500 000. Ce déficit s’explique par des coûts de construction élevés provoqués par une raréfaction du foncier, un durcissement des normes, et par la dominante artisanale du secteur du bâtiment. Depuis une quarantaine d’années, les pouvoirs publics ont pris de nombreuses mesures pour tenter de résoudre la crise du logement. Chaque année, une quarantaine de milliards d’euros y est consacrée. Or, comme l’a, à maintes reprises, souligné la Cour des comptes, les aides fiscales en faveur de l’investissement immobilier locatif ont contribué davantage à augmenter les prix de l’immobilier qu’à résoudre la crise. Elles ont, par ailleurs, créé un effet de dépendance pour le secteur du bâtiment qui redoute leur arrêt.

 

Le budget 2025 devrait donner lieu à d’épiques débats sur le sujet de l’immobilier en raison de l’absence de majorité. Déjà, de multiples propositions émanent des différents groupes, allant de la reconduction du dispositif Pinel en faveur de l’investissement locatif à la réforme du régime fiscal des plus-values, en passant par le durcissement de l’impôt sur la fortune ou l’alignement des règles des locations saisonnières sur celles des locations classiques. L’année dernière, les parlementaires avaient décidé d’aligner le régime fiscal des locations saisonnières sur celui des locations traditionnelles. Or, le gouvernement a fait savoir qu’il ne prendrait pas les décrets d’application. Au nom du principe d’égalité de traitement et pour éviter la poursuite de l’attrition du parc locatif classique, cette harmonisation se justifie. En matière de plus-values, aujourd’hui, les résidences principales bénéficient d’une exonération totale tandis que les autres y sont soumises avec un abattement qui augmente avec la durée de détention. L’exonération de l’ensemble des prélèvements sociaux et fiscaux n’intervient qu’au bout de 30 ans.

Ce régime rigidifie le marché et conduit à de nombreuses fraudes, les propriétaires ayant tendance à qualifier leur résidence secondaire de résidence principale afin d’échapper à la taxation des plus-values. L’idée de la suppression de l’abattement a été avancée, mais dans ce cas, il convient d’intégrer l’inflation pour déterminer la plus-value.

L’indice à retenir ne devrait pas être celui des prix à la consommation, mais celui des prix de l’immobilier. Il ne serait pas alors illogique d’appliquer ce régime aux résidences principales afin de lutter contre la spéculation, en prévoyant peut-être un taux plus faible.

 

Des voix se font entendre pour réinstaurer l’impôt de solidarité sur la fortune. L’extension de l’assiette de l’actuel IFI aux biens mobiliers aboutirait, dans les faits, à imposer davantage les biens immobiliers. Or, dans une large majorité des cas, le patrimoine immobilier se limite à la possession de la résidence principale qui, en soi, n’est pas source de revenus. Une réinstauration de l’ISF pénaliserait sans nul doute de nombreux propriétaires résidant dans de grandes agglomérations, propriétaires pas nécessairement fortunés.

Comme pour toute activité économique, l’immobilier gagnerait à avoir une fiscalité simple reposant sur une large assiette avec des taux faibles. La recherche de la plus grande neutralité fiscale en la matière serait souhaitable. Pour tenter de mettre un terme à la pénurie de logements en France et améliorer sensiblement les conditions de vie de la population, une levée des contraintes s’impose, que ce soit sur le plan urbanistique ou fiscal. L’abandon de la politique malthusienne à l’œuvre depuis une vingtaine d’années est nécessaire. Il est possible de construire plus et pour moins cher tout en conciliant les impératifs environnementaux.

 

De plus je vous rappelle que la France s’est engagée à faire zéro artificialisation des sols en 2050. Pour lutter contre l’artificialisation des sols, la loi « Climat et résilience » du 22 août 2021 a défini un objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) pour 2050. La loi du 20 juillet 2023 tend à faciliter sa mise en œuvre, notamment par les élus locaux. Dès aujourd’hui les communes ne peuvent artificialiser que la moitié de l’année dernière et ainsi de suite chaque année.

Ce qui est rare est cher !!