C’est la période estivale : le moment de faire une pause et de rattraper notre retard de lecture. Voici une information sur la finance comportementale. Nos comportements à chacun face à nos investissements.
« Le principal problème de l’investisseur, et même son pire ennemi, n’est autre que lui-même. »
(Benjamin Graham)
Intemporelle, cette citation de Benjamin Graham, le père de l’investissement « value », n’a en rien perdu de sa pertinence plusieurs
décennies après sa disparition. Les scientifiques américano-israéliens Daniel Kahneman et Amos Tversky ont apporté une grande
contribution à la recherche sur les processus psychologiques à l’origine de ce phénomène. Tous deux ont marqué de leur empreinte la
finance comportementale (behavorial finance). Le premier en résume ainsi les résultats :
« L’intuition brouille la pensée claire. »
(Daniel Kahneman)
La finance comportementale et les travaux des deux chercheurs sur les biais (biases) dans la prise de décision font aujourd’hui partie
intégrante de la formation des gérants de portefeuille et également du jargon des investisseurs. Alors que les Bourses fluctuent
quotidiennement, les gérants de portefeuille, qui sont responsables des actifs qui leur ont été confiés par les investisseurs, sont confrontés
presque chaque jour à ces biais.
Mais que signifient exactement ces biais et de quels biais sont victimes les investisseurs ?
De manière générale, on parle de biais lorsqu’une décision est prise sur la base d’un préjugé ou d’une préférence. Au sens figuré, toutes
nos décisions passent par des filtres qui nous sont propres. Ceux-ci peuvent être influencés par l’expérience, la capacité de jugement, les
normes sociales, les hypothèses, les connaissances théoriques, etc. Une distinction est généralement établie entre les biais cognitifs et
les biais émotionnels.
Les biais cognitifs dans la prise de décision reposent sur des concepts établis. Le fait que ceux-ci soient exacts ou non n’a aucune
importance en la matière. Les inexactitudes qui en découlent proviennent d’erreurs statistiques ou apparaissent durant le traitement ou le
stockage de l’information.
A ces biais cognitifs s’opposent les biais émotionnels qui se manifestent spontanément et reposent sur l’intuition au moment de la prise de
décision.
Les erreurs cognitives peuvent se corriger plus facilement que les biais émotionnels. En effet, il est difficile de se défaire de ses biais
émotionnels dans la mesure où ceux-ci reposent sur l’intuition.
Deux des biais cognitifs les plus connus sont le biais de confirmation et le biais rétrospectif.
Le premier désigne la tendance à privilégier ou interpréter les informations qui confirment notre propre opinion. Indépendamment des
origines de ce comportement, qui peuvent être aussi diverses que la préservation des ressources ou le renforcement de la confiance en
soi, le biais de confirmation donne lieu à une assimilation d’information extrêmement partiale allant jusqu’à la négation des arguments
contraires et donc jusqu’à l’amplification et à la confirmation inconscientes de notre propre opinion. Au final, cette erreur entraîne de
mauvaises décisions, dans la mesure où tous les arguments disponibles n’ont pas été pris en compte. Le biais rétrospectif consiste à
surestimer sa capacité à prévoir des événements futurs en se basant sur la connaissance a posteriori d’événements passés. Cette erreur
de jugement peut à son tour entraîner de mauvaises décisions ou, dans le contexte de l’investissement, la prise de risques inconsidérés
car les liens de causalité des circonstances et des origines de l’événement à prévoir n’ont pas été suffisamment pris en compte.
Autre biais émotionnel, l’excès de confiance a un effet semblable, mais une origine différente. Même si cette erreur de jugement ne se
manifeste pas sous sa forme extrême (hybris), le décideur, confiant dans ses succès passés ou ses connaissances pointues, a tendance à
surestimer ses capacités de prévision. Le dernier biais présenté ici se range également dans le camp émotionnel. S’agissant d’un schéma
de comportement typique des investisseurs, il exerce une influence déterminante sur les décisions d’investissement. Il s’agit du biais de
l’aversion à la perte qui incite l’investisseur à prendre des décisions qui s’avèrent irrationnelles a posteriori et qui ne répondent donc pas à
l’utilité économique espérée. Dans le cadre de leur théorie des perspectives, les scientifiques Kahneman et Tversky mentionnés en
introduction ont démontré à l’aide d’une fonction de valeur virtuelle que, grosso modo, les pertes ont un poids plus important que les gains
à amplitude équivalente. En conséquence, les investisseurs ont tendance à être réticents au risque en matière de gains, autrement dit, à
réaliser leurs bénéfices de manière anticipée, et à prendre davantage de risques en matière de pertes, autrement dit, à laisser durer celles-ci
trop longtemps.
Nous avons sur ce site un onglet afin de calculer votre « aversion » au risque.
Faites-le pendant l’été !
A bientôt.
Très cordialement, Pierre Emmanuel JOSEPH